Rétro 2024 : Livres sur l’angoisse existentielle

Livre : John Irving, Le monde selon Garp

Posté le 3 août 2024 sur unefrancaisedanslalune

Après vos ‘ti messages pour me réconforter sur Instagram, j’écris cet article sur le thème de l’angoisse existentielle ! 💕✨

Savez-vous qu’il existe des romans sur les crises d’angoisse et la dépression ?

Vous les avez peut-être lus. La littérature est littéralement fondée sur ça 😂 voici un panorama ! 

Pourquoi la littérature adore les crises d’angoisse existentielle (et nous aussi)

Ah, la crise d’angoisse existentielle, ce doux poison littéraire. Vous savez, ces moments où un personnage se demande si ça vie vaut plus que celle d’une mouche, ou s’il ne vaut pas mieux s’isoler, bitcher sur tout le monde, voire vivre en autarcie totale. Qu’est-ce qui rend ce thème si irrésistible pour les écrivains (et les lecteurs) ? Prenons notre tasse de thé bio équitable (ou pas, éco-anxiété bonjour) et immergeons nous jusqu’à nous noyer à travers cette question avec la gravité légère qui sied aux pages culturelles d’un bon numéro de Télérama (ou pas).

La réflexion sur la condition humaine

Commençons par l’évidence : la crise d’angoisse existentielle est une porte dérobée vers les grandes questions de la vie. Parfois, c’est fait d’une façon très hautaine : genre, hey, regardez mon livre, il est stylé, j’ai écrit une histoire de taré, alors vous allez la lire bandes de … biiip… Il y a même des livres qui portent un titre sans équivoque. 

Exemple : « La condition humaine » André Malraux 1933 

La Condition humaine d’André Malraux est un roman publié en 1933 qui explore les thèmes de la révolution, de l’engagement politique et de la lutte pour la liberté. Situé en Chine pendant l’insurrection communiste de Shanghai en 1927, le roman suit plusieurs personnages impliqués dans la rébellion, chacun confronté à des dilemmes moraux et des crises personnelles.

Le livre traite de la complexité des motivations humaines, de l’impact de l’idéologie sur l’individu, et de la question de savoir si les actions violentes peuvent être justifiées par des objectifs politiques. Les personnages principaux, tels que Kyo Gisors, Tchen, et Katow, représentent différentes perspectives sur la lutte révolutionnaire, et à travers leurs histoires, Malraux explore les tensions entre l’idéal et la réalité, le sacrifice personnel et le destin collectif.

Et quoi de mieux que la littérature pour explorer le sens de l’existence, la mort, la liberté, et ce bon vieux sentiment d’isolement ? On pourrait dire que la littérature est à la crise existentielle ce que la baguette est au bol de riz (j’ai le droit de faire cette analogie par mes origines hautement cambodgiennes 😂) .

L’expression de l’expérience humaine

Ne nous leurrons pas : l’angoisse existentielle, c’est universel. Un bon roman sur ce thème, c’est comme un miroir dans lequel chaque lecteur et chaque lectrice peut se voir en pyjama, se demandant pourquoi il ou elle est maudit-e jusqu’à la fin des temps. Le journal de Bridget Jones de Helen Fielding (1996), commence littéralement comme cela. Ces moments de doute et de questionnement sont des expériences partagées, et voir nos héros littéraires s’y débattre, c’est réconfortant (du moins autant que de voir quelqu’un d’autre galérer autant que nous). Certains romans, comme celui que j’ai cité, jouent sur la vague contemporaine du sentiment d’angoisse existentielle lié à des problèmes sociaux créés par nos représentations et nos imaginaires collectifs : le célibat serait mal vécu, ne pas rentrer dans les codes physiques du canon esthétique moderne, etc. Or, cela fait longtemps que ce mal être est décrit. On le trouvait ainsi chez Jane Austen, par exemple.

Conflit et tension narrative

Imaginez un roman sans conflit : ennuyeux, non ? Les crises d’angoisse existentielle sont du pain bénit pour les auteurs en quête de drame. Elles créent des conflits internes si puissants qu’ils pourraient alimenter une centrale électrique. C’est souvent ce qui fait avancer l’intrigue et évoluer les personnages – parce qu’après tout, rien ne vaut une bonne crise existentielle pour pimenter une journée.

C’est aussi un moyen d’ajouter un problème et un enjeu pour étoffer les personnages. Une technique d’écrivain pour vous faire douter des capacités du héros ou de l’héroïne, ou bien pour vous faire croire qu’un passé sombre et mystérieux enveloppe l’aura de votre détective préféré. C’est le cas dans les polars au froid arctique, chez les Islandais, les Suédois, et même chez nos Franchouillards comme Fred Vargas, autrice de qualité, qui met en avant un commissaire on ne peut plus angoissé.

D’autres autrices mettent en scène la paranoïa, à la limite de la folie par l’accent sur la dépression du personnage : cela permet d’en faire quelqu’un d’isolé, de solitaire, la Cassandre que personne ne croit. Et puis finalement, comme dans le mythe antique, la Cassandre avait raison. Ainsi, Gillian Flynn, romancière de thriller à grand succès, utilise ce motif littéraire à tout va, notamment dans « Sharp Objects »

Influence des courants philosophiques

Ah, l’existentialisme ! Jean-Paul Sartre, Albert Camus, Fiodor Dostoïevski – ces noms qui font frémir les étudiants en philo (ou leur donne une syncope c’est selon). Leur influence est telle que la crise existentielle est devenue un passage obligé de la réflexion philosophique. Dans ce type de discours du doute, voire du scepticisme, ne pas être certain ou certaine de ce qu’on avance est devenu une mode qui rend la philosophie complètement abstraite, mais aussi plus terre à terre. Comme Descartes a commencé et qu’il en est arrivé à son Cogito, d’autres ont continué avec des façons plus intelligibles. L’on peut citer entre XVIIe et XVIIIe siècles :

René Descartes (1596-1650) aka René la taupe (ah non, c’est quelqu’un d’autre)

  • C’est au travers de ses « Méditations métaphysiques » que Descartes explore le doute méthodique en remettant en question toutes ses croyances jusqu’à parvenir à la célèbre conclusion « Je pense, donc je suis ». Ce processus de doute radical peut être lié à des préoccupations existentielles.

Blaise Pascal (1623-1662) aussi connu sous le surnom de Blaisounnet :

  • Dans ses « Pensées », Pascal traite de l’angoisse existentielle et du scepticisme. Il explore la condition humaine, la misère et la grandeur de l’homme, et la quête de sens dans un univers apparemment indifférent.

Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), également appelé Jackou :

  • Dans « Les Rêveries du promeneur solitaire », Rousseau aborde des thèmes d’introspection et d’angoisse personnelle. Ses écrits expriment souvent un sentiment de malaise et de doute par rapport à la société et à l’existence humaine.

Michel de Montaigne (1533-1592) connu du doux nom de Michou (mais le Ier) :

  • Bien qu’il soit un peu antérieur au XVIIe siècle, Montaigne, dans ses « Essais« , explore le doute et le scepticisme, particulièrement dans l’essai « Que sais-je ? ». Son travail est une réflexion personnelle sur la nature humaine et l’incertitude de la connaissance.

Grâce à eux, la littérature est devenue un terrain de jeu où se rencontrent les grandes questions philosophiques et les petites névroses quotidiennes.

Exploration psychologique

La littérature est un scalpel qui découpe les pensées et les émotions de ses personnages. Explorer une crise d’angoisse existentielle, c’est ouvrir une boîte de Pandore psychologique : fascinant et légèrement terrifiant. C’est cette plongée dans les abîmes de la conscience humaine qui nous fait revenir pour en redemander, comme un bon vieux cliffhanger de série télé.

Parmi les sagas ou séries de romans qui ont ce ressort de la psychologie humaine, on retrouve le très fameux Twilight de Stephanie Meyer (2003), saga dans laquelle Bella Swan, simple humaine, tombe dans une profonde dépression à cause d’un put*in de vampire. 🧛 Autrement, nous pouvons remarquer qu’il existe tout un tas de sagas Young adult sur la déprime ou l’angoisse, fréquemment liées à une histoire d’amour. C’est ainsi que Sublimes créatures de Kami Garcia (16 lunes, premier tome en 2009) évoque le conflit intérieur de l’adolescence, les questions de rejet, d’amitiés de problèmes de famille, etc.

Réflexion sur la société

Les crises existentielles ne surgissent pas de nulle part. Elles sont souvent déclenchées par les tensions sociales, politiques ou culturelles. La littérature, c’est un peu le psychanalyste de la société, qui nous aide à comprendre nos angoisses collectives face aux changements et aux incertitudes. Et soyons honnêtes, vu l’état du monde actuel, ce n’est pas la matière qui manque.

Prenons Toni Morrison, par exemple. Dans ses romans, l’angoisse existentielle est omniprésente, que ce soit à travers les luttes intérieures des personnages dans « Beloved » ou la quête d’identité et la folie dans « The Bluest Eye ». Ses œuvres plongent au cœur des tourments de l’âme et des questions profondes de la condition humaine.

On trouve aussi des personnages directement sur canapé. La joyeuse mais finalement dépressive Holly Golightly et son ami écrivain solitaire dans Diamants du canapé (Breakfast at Tiffany’s) de Truman Capote en font un bon sujet. La complainte de Portnoy de Philip Roth joue sur la complexité de la vie sexuelle de son narrateur, gênant au possible mais chef d’œuvre intellectuel en 1969.

Dans d’autres histoires, tels que les romans sentimentaux, la santé mentale est un sujet central :

« Rien ne s’oppose à la nuit » de Delphine de Vigan
✨ Ce roman autobiographique explore la vie de la mère de l’auteure, Lucile, qui souffrait de troubles mentaux graves, y compris des crises d’angoisse et des épisodes de dépression.

D’autres auteurs jouent sur les déterminismes et la fatalité :

« Le monde selon Garp » de John Irving
✨ Ce roman suit la vie de T.S. Garp, un écrivain et père de famille, et aborde ses peurs et angoisses concernant la violence et l’incertitude du monde moderne.


Catharsis et compréhension

Pour les auteurs et les lecteurs, aborder ces crises dans la littérature, c’est une forme de catharsis. C’est comme un grand nettoyage de printemps émotionnel. On y trouve des moyens de faire face à ces sentiments, on les comprend mieux, et parfois, on en rit – parce qu’après tout, mieux vaut en rire qu’en pleurer.

Prenons aussi Maya Angelou. Ses mémoires, comme « I Know Why the Caged Bird Sings », sont des explorations poignantes de la survie face à l’adversité, transformant les crises personnelles en actes de résilience et d’empowerment (je déteste ce mot). 

Héritage littéraire

Enfin, n’oublions pas la tradition. De la tragédie grecque aux romans modernes, la crise existentielle a toujours eu sa place. C’est un héritage qui continue d’influencer les écrivains contemporains. Un peu comme une vieille recette de famille, transmise de génération en génération, avec ce petit goût de déprime subtile qui nous fait nous sentir étonnamment vivants.

Prenons Zora Neale Hurston et son chef-d’œuvre « Their Eyes Were Watching God ». Le roman explore les luttes intérieures de Janie Crawford, mêlant crise existentielle et quête d’identité dans un contexte de changements sociaux et culturels. Dans le genre tragique, Albert Camus fait dans l’excellence, malgré un prisme contemporain qui nous permet d’interpréter autrement l’histoire d’une perspective post coloniale :

✨« L’étranger » d’Albert Camus
Si l’on enlève le problème majeur de point de vue du roman : ce récit existentiel explore la vie de Meursault, un homme détaché émotionnellement, qui finit par commettre un meurtre dans un délire angoissant. Le roman examine l’absurdité de la vie et les angoisses existentielles.

La poésie comme le journal intime, héritage de nombreux auteurs adeptes des Antiques tels que Montaigne, ont permis à des auteurs et des autrice de se libérer des carcans sociaux :

« La cloche de détresse – The Bell Jar » de Sylvia Plath
✨ Ce livre semi-autobiographique suit Esther Greenwood, une jeune femme prometteuse qui sombre dans une dépression profonde et des crises d’angoisse, luttant pour trouver un sens à sa vie.

Sans parler du « Procès » de Franz Kafka et de la moitié de la biblio de Dostoïevski (« Crime et châtiment ») ! De même, Le loup des steppes de Hermann Hesse fait écho à la folie du monde, ou en tout cas des Hommes… et sur la dépression, Mrs Dalloway de Virginia Woolf est une expérience de l’ennui qui se traduit et s’apprécie difficilement si l’on ne connaît pas ce sentiment de solitude et de tristesse.

J’espère que vous avez aimé cet article très gai pour vous servir. 

T A. 2024


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